1 septembre 2015

Retour à la vie "normale"

Ísafjörður, l'île déserte dans l'île déserte - crédits : Nicolas Martinez
Un long silence. On croirait presque que voilà un autre de mes fameux silences radio, un silence de ceux dont je semble avoir le secret. Si c'est ce que l'on se dit, on n'a, il faut bien le dire, qu'à moitié tort. 

Si mes silences généralisés sont plus ou moins une des (seules) constantes de ce blog, et, même si il y a fort à parier que ce n'est là qu'un parmi de possibles autres à venir, vous auriez mieux fait d'écouter celui-ci avec un plus d'attention. 
Après quelques courts instants, vous auriez alors eu le sentiment que l'on a habituellement en un chaud jour de Juillet, quand on se demande pourquoi son appartement baigne dans une terrible odeur de mort et que l'on réalise soudain qu'on a tout simplement oublié de sortir la poubelle contenant le kilo de carcasses de crevettes de la veille. Oui carrément. Vous auriez eu ce qu'on appelle dans le jargon une épiphanie. -Après tout c'était peut-être pour une galette des rois à la sauce aux champignons, les crevettes.


Enfin revenons à nos moutons. 
 
Moutons Ísafjörðais - crédits : Nicolas Martinez

Tout comme l'odeur des crevettes épiphaniques, ce silence aurait dû vous rappeler le silence de quelqu'un pour qui le temps a pris une réalité sensiblement différente de celle de la Terre. 
Vous auriez alors pu envisager le fait que j'étais en orbite autour d'un trou noir, en train de profiter des joies de la vie à proximité d'une singularité gravitationnelle relativiste. Et vous auriez eu presque raison, si ce n'est que la singularité en question n'est pas un trou noir, ou tout au plus un trou, paumé. Et magnifique. Je vous le donne en mille : la terra Islandica en personne !

Le fjord d'Ísafjörður en panoramique - crédits : Nicolas Martinez

Difficile en effet pour le néophyte Scandinophile de se représenter a quoi peut bien ressembler la vie en Islande.

Car il faut bien le dire, le fait de se couper le bras gauche avec un couteau suisse à la lame rouillée et celui de vivre sur une île désertique peuplée par des insulaire fort peu... continentaux, et isolée du continent par plus d'un millier de kilomètre d'eau glaciale ont au moins une chose en commun : la seule manière de vraiment savoir ce que ça fait, c'est d'essayer par soi-même. Enfin, vous pouvez aussi recueillir le témoignages des pauvres fous qui ont tenté l'expérience, afin de vous donner une idée, puis décider de sauter le pas. Ou pas. Enfin, dans tous les cas, en particulier le deuz' je vous conseille d'être a jour niveau vaccin antitétanique... 

Pour les débutants donc, voici :
Le processus d'expatriation en Islande simplifiées en 4 étapes sommaires :

1 - L'arrivée (10 premiers jours) : L'individu nouvellement arrivé en Islande (re-)trouve avec exaltation les décors magnifiques de l'Islande. Son lien théorique avec le reste du monde reste fort, son lien pratique dépend beaucoup de la qualité de la WIFI à laquelle il a accès (... !) Enfin, il lit/regarde encore les nouvelles internationales quotidiennement et s'y intéresse personnellement.

2 - L'acclimatation (40+ jours) : Même si on ne s'y fait jamais vraiment, il vient un moment ou une certaine routine s'installe, c'est mécanique. On prend le pli et le dessus des paupières aussi : c'est que les 35 heures, on en est bien loin ici-haut ; une semaine de travail islandaise normale représentant au bas mot 48 heures + heures sup' sur 6 jours par semaine. (Pour info, les 40 heures hebdomadaires furent votées en France en 1936 par le Front Populaire). La fatigue, le manque d'intérêt national pour ce qui se passe par dela les mers commence et le rythme de vie étrange de l'île commencent à déteindre sur moi.... Enfin, je veux dire sur l'individu, que l'on appelera Günter145fed5t pour éviter toute ambiguité. 
S'intéresse aux nouvelles internationales environ une fois par quinzaine.


3 - L'insularisation (6+ mois) : Ayé, on est devenu un gros con... sommateur d'Egils Appelsín (Orangina à l'Islandaise). Ce qu'on fait en Islande, on sait plus trop, mais on suppose que c'est à cause des paysages fabuleux et tout ca... En tout cas, c'est pas à cause de la bouffe, du climat ou de la langue alambiquée, ca non...
Après bon, on est encore conscient qu'il y a un monde, loin vers le large, d'ailleurs on se souvient vaguement qu'on vient de là-bas, vue qu'apparemment, notre famille y est toujours.  
Lit les nouvelles par petit accoups, 2-3 fois par mois, 

4 - Le choix (12+ mois) : Voilà le moment fatidique tant redouté, suite logique du processus d'expatriation dans tout pays. Sauf que bon, le choix de rester en Islande avec pour seuls éléments les 12 premiers mois qu'on y a passé est tout sauf aisé, et tous ceux qui sont passés par là seront d'accord là-dessus. En effet, comment peut-on se baser sur une expérience Islandaise qui selon toute probabilité a été extrêmement mouvementée et inconstante, vascillant sans cesse de haut en bas ?
Me voilà donc arrivée à cette étape, bien que mon séjour ait été interrompu par une aventure fort malheureuse au pays de la smörgåstårta et du surströmming. Rester ou partir, une fois le cycle d'une année étant passé...

Sur les hauteurs du Suðurlandi - crédits : Nicolas Martinez
Me concernant, partir est une certitude, cette question ne se pose pas pas vraiment, étant donné qu'une autre, qui a pris les proportions titanesques d'un choix en quittes ou quintuple, a déjà pris le dessus, mais elle est la même, bien que sous une forme plus générale : Rester ou quitter... le Nord.
Question fort difficile à prendre pour des raisons psychologiques évidentes, après presque 5 années passées en terres Nordiques. Et, si c'était bien loin d'être la premiere prise de conscience de ce style, celle-ci aura en tout cas été la premiere à être traîtée d'un point de vue pragmatique plutôt que sentimental/utopiste. Et donc, je vous le donne en mille, Paris, me voilà, d'ici un peu moins d'un mois probablement, pour de nouvelles aventures. Est-ce que mon retour en France pourrait sonner le glas de ce blog ? Je ne saurais le dire, mais pour le moment, faisons comme si de rien n'étais ! :)

 
Vue aérienne des fjords du Nords-ouest de l'Islande - crédits : Nicolas Martinez


Portez-vous bien ! 


Bless bless,

Nicolas